Le rôle clé des femmes pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle [en]

Les femmes sont des actrices essentielles du développement rural et de l’agriculture durable. Indispensables à la sécurité alimentaire et nutritionnelle mondiale, elles font pourtant face à de profondes inégalités. La réflexion sur l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes doit prendre en compte les multiples rôles assumés par les femmes dans le système alimentaire (productrices, entrepreneuses, dirigeantes et consommatrices).

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L’autonomisation des femmes pour parvenir à l’égalité des genres : un facteur de développement durable pour assurer la sécurité alimentaire et nutritionnelle

Dans le rapport sur la situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture (SOFA, 2011), intitulé « Le rôle des femmes dans l’agriculture : combler le fossé entre les hommes et les femmes pour soutenir le développement », l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (OAA / FAO) souligne le rôle clé des femmes dans le secteur agricole et dresse le constat selon lequel l’inégalité hommes-femmes est un frein au développement et à la sécurité alimentaire. Ce rapport a été l’un des catalyseurs de la prise de conscience du rôle clé des femmes.

Les femmes sont effectivement des actrices essentielles du monde agricole. Dans le monde, elles représentent plus de 37 % de la main-d’œuvre agricole rurale. Un ratio qui passe à 48 % dans les pays à faible revenu, et jusqu’à 80% dans les pays du Sahel par exemple (FAO, 2016). Elles représentent près de 50 % des 600 millions de petits éleveurs de bétail dans le monde et environ la moitié de la main-d’œuvre dans la pêche à petite échelle (OIT, 2020). Pourtant leur travail, souvent informel et opéré dans le cadre familial, est rarement reconnu ou rémunéré comme tel.

Elles font face en outre à de nombreuses inégalités par rapport aux hommes, qui freinent leur potentiel dans le développement de l’économie. L’accès à la terre est l’une des principales disparités entre les sexes, puisque les femmes représentent encore moins de 15 % des propriétaires de terres agricoles dans le monde. Elles ont un accès limité aux différents types de services de soutien à l’agriculture, comme les crédits, intrants ou la mécanisation. Un écart considérable entre les sexes persiste dans l’accès aux technologies, par exemple les femmes des pays à faible et moyen revenu ont 10 % de chances en moins que les hommes de posséder un téléphone mobile et 23 % de chances en moins d’utiliser l’internet mobile. De même, les inégalités entre les sexes sont évidentes sur les marchés du travail agricoles : les femmes rurales sont plus susceptibles que les hommes d’occuper un emploi faiblement rémunéré, à temps partiel et saisonnier, sans protection juridique ou sociale, et elles ont tendance à être moins bien payées même lorsqu’elles sont plus instruites et plus qualifiées que les hommes.

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En 2019, sur tous les continents, la prévalence de l’insécurité alimentaire était plus élevée chez les femmes que chez les hommes, et 60 % des personnes souffrant chroniquement de la faim dans le monde étaient des femmes et des filles. Des preuves montrent à la fois que les inégalités hommes-femmes provoquent une insécurité alimentaire (la faim atteint des niveaux plus élevés dans les pays où le degré d’égalité des genres est plus bas), et que l’accroissement de l’égalité des genres et de l’autonomisation des femmes améliore la sécurité alimentaire et la nutrition (CARE, 2020).

Les femmes jouent également un rôle crucial dans la gestion de l’alimentation et de la bonne nutrition à l’intérieur des familles. Adultes, adolescentes ou petites filles, elles sont cependant davantage victimes de la malnutrition.

Le 25 septembre 2015, lors de l’Assemblée générale des Nations unies à New York, les Etats se sont accordés sur 17 Objectifs de développement durable (ODD) pour mettre fin à la pauvreté, lutter contre les inégalités et les injustices, faire face au changement climatique et construire un monde en commun d’ici à 2030. L’un d’eux rappelait que l’égalité des sexes n’est pas seulement un droit fondamental à la personne, mais aussi un fondement nécessaire pour l’instauration d’un monde pacifique, prospère et durable. Ainsi,l’ODD n°5 est de parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles.

Ces nombreuses inégalités engendrent de grande pertes au niveau de la production agricole et sont aussi une entrave la croissance économique et à l’atteinte de la sécurité alimentaire. En effet, selon le rapport SOFA 2011, si les femmes avaient le même accès que les hommes aux ressources productives, elles pourraient augmenter de 20 à 30 pour cent les rendements de leur exploitation, ce qui aurait pour effet d’accroître la production agricole totale des pays en développement de 2,5 à 4 %. Des gains de production de cette ampleur pourraient réduire de 17 pour cent le nombre de personnes souffrant de faim dans le monde. Par ailleurs, il est démontré que la gestion d’un capital plus important par les femmes a des effets positifs sur la formation de capital humain et sur la croissance économique, les femmes dédiant une part plus importante que les hommes à l’alimentation, à la santé et à l’éducation de leurs enfants.

La pandémie COVID-19 a creusé des inégalités déjà existantes dont souffrent les femmes et les filles dans tous les domaines et a entraîné une forte augmentation de la violence à l’égard des femmes et des filles. Par ailleurs, les femmes remplissent un rôle prépondérant dans la lutte contre le virus, notamment en tant que travailleuses de santé de première ligne et en tant que dispensatrices de soins au sein des familles. La pandémie de COVID-19 offre l’occasion de prendre des mesures radicales et positives pour remédier à des inégalités qui affectent de nombreux domaines de la vie des femmes depuis longtemps, mais également de construire un monde plus juste et plus résilient. L’égalité entre les femmes et les hommes est l’un des défis majeurs du développement humain dans le monde.

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Investir dans les femmes et les filles permettrait d’accélérer le progrès agricole, le développement rural, la sécurité alimentaire et la nutrition. En garantissant aux femmes un meilleur accès et un meilleur contrôle des actifs et des ressources, la productivité et la production agricole augmentent, avec des avantages pouvant s’étendre sur plusieurs générations et rapporter d’importants dividendes à l’avenir.

L’amélioration de la sécurité alimentaire passe par trois domaines d’action prioritaires :

  • L’élimination des discriminations hommes-femmes dans l’accès aux ressources agricoles, à l’instruction, à la vulgarisation, aux services financiers et aux marchés du travail ;
  • L’investissement dans des technologies et des infrastructures pour réduire la pénibilité du travail agricole, améliorer la productivité et faire face au changement climatique ;
  • La facilitation de la participation des femmes aux prises de décisions.

L’application de méthodologies spécifiques lors de la conception des projets de développement, comme le font les trois agences des Nations unies basées à Rome, peuvent contribuer à améliorer grandement l’impact des actions de développement dans le domaine de la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Celles-ci peuvent concerner l’étude de la répartition de la charge de travail et de la nourriture au sein des ménages, l’utilisation d’un indicateur mesurant la diversité alimentaire chez les femmes, la notation systématique des projets suivant leur degré de prise en compte du genre.

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Les stratégies des trois agences romaines en matière d’égalité des genres et d’autonomisation des femmes

La politique de la FAO

La FAO a établi pour la période 2020-2030 une politique d’égalité entre les femmes et les hommes, qui a pour objectif principal d’atteindre l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’agriculture durable et le développement rural afin d’éliminer la faim et la pauvreté. A travers cette politique, l’organisation s’est engagée à atteindre quatre objectifs à l’horizon 2030 : (i) Les femmes et les hommes ont une voix et un pouvoir de décision égaux dans les institutions et les organisations rurales pour façonner les cadres juridiques, les politiques et les programmes pertinents, (ii) Les femmes et les hommes ont les mêmes droits, accès et contrôle sur les ressources naturelles et productives, afin de contribuer à une agriculture et un développement rural durables et d’en bénéficier, (iii) Les femmes et les hommes ont des droits et un accès égaux aux services, aux marchés et à un travail décent, ainsi qu’un contrôle égal sur les revenus et les avantages qui en découlent, (iv) La charge de travail des femmes est réduite en améliorant leur accès aux technologies, aux pratiques et aux infrastructures et en favorisant une répartition équitable des responsabilités, y compris au niveau du ménage.

La politique de la FAO en matière d’égalité des sexes 2020-2030 décrit la double stratégie qui sera adoptée par l’organisation et l’intégration de la dimension de genre dans les travaux normatifs et techniques, et déploiement d’interventions ciblées.

L’engagement du PAM

La politique du PAM en matière de problématique femmes-hommes pour la période 2015-2020 est mise en œuvre par le biais d’un plan d’action visant à la rendre opérationnelle sur le terrain et à engager les transformations organisationnelles nécessaires. Il comporte 4 grands objectifs, (i) Apporter une assistance alimentaire adaptée à des besoins spécifiques, (ii) Faire participer sur un pied d’égalité hommes et femmes à la conception des programmes, (iii) Favoriser la prise de décision des femmes et jeunes filles, (iv) Protéger les femmes des violences sexistes.

Pour agir de manière adaptée aux différents besoins, l’organisation priorise la collecte et l’analyse de données ventilées par sexe et aussi désormais par âge. De même qu’à la FAO, la problématique de l’égalité des genres est traitée de manière transversale dans tous les projets et programmes.

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Les stratégies du FIDA

La politique du FIDA concernant l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes date de 2012 et s’articule autour de 3 objectifs stratégiques  : (i) Promouvoir l’autonomisation économique des femmes, (ii) Assurer une participation et une influence égales au sein des institutions et organisations rurales, (iii) Faire en sorte que la charge de travail et les bénéfices sociaux et économiques soient équitablement partagés.

Le FIDA a par ailleurs adopté un Plan d’action pour intégrer les approches porteuses de transformation de la problématique du genre pour la période 2019-2025, s’engageant à ce que 25 % des projets soient porteurs de transformation des rapports entre les sexes et à ce que les approches transformatrices soient inclues dans les documents de conception, mise en œuvre et suivi. La douzième reconstitution du FIDA – FIDA12 – témoigne d’un engagement accru en faveur de la parité avec un objectif de 40% de femmes à des positions de direction – contre 35% lors de la onzième reconstitution FIDA11 – et un seuil minimal de 35% des projets porteurs de transformation des rapports femmes-hommes.

Le FIDA continue par ailleurs de développer des outils et de mener des études afin de mieux comprendre les différents rôles, intérêts et priorités entre les femmes et les hommes. Ces études permettent notamment de mesurer le degré de contrôle des femmes sur des points critiques tels que les prises de décision, l’accès aux ressources, le contrôle du revenu, le leadership au sein de la communauté.

Le Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires, qui se tiendra en septembre à New York, identifie sept priorités clés en lien avec l’égalité femmes-hommes où des solutions potentielles sont nécessaires pour rendre les systèmes alimentaires équitables : garantir les droits des femmes à la terre ; autonomisation économique des femmes dans les systèmes alimentaires ; s’attaquer au poids des soins et du travail agricole non rémunérés des femmes ; voix, prise de décision et leadership des femmes dans les systèmes alimentaires ; accès aux technologies, y compris numériques ; changer les normes, s’attaquer aux obstacles institutionnels et combatte la violence sexiste ; politiques transformatives en matière de genre pour les systèmes agricoles et alimentaires.

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L’engagement de la Représentation permanente dans la défense de l’égalité femmes-hommes à Rome

La France renforce la cohérence et l’efficacité des actions en faveur de l’égalité femmes-hommes dans ses politiques d’aide au développement ainsi que son action extérieure. La Stratégie internationale de la France pour l’égalité entre les femmes et les hommes (2018-2022) est un outil de pilotage conçu pour coordonner les actions dans les cinq prochaines années et améliorer la situation des femmes partout dans le monde.

Cette nouvelle stratégie internationale inscrit le principe de l’égalité femmes-hommes au cœur de toutes les actions à l’international menées par la France et définit ainsi un cadre d’action qui préconise une intégration transversale du genre dans tous les secteurs d’activités ainsi que dans l’organisation du ministère et pour ses opérateurs.

La France s’est engagée à ce que d’ici 2022, 50 % de son aide publique au développement soit affecté - via l’Agence Française de Développement - à des projets ayant pour objectif significatif ou principal l’égalité femmes - hommes. Le président de la République a créé une enveloppe de financement en dons de 120 millions d’euros, portée dès 2019 par l’AFD avec notamment pour objectif d’aider les mouvements féministes et les ONG, en particulier du Sud, à mener partout le combat pour l’égalité, les droits et la dignité des filles et des femmes.

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Conformément à la Stratégie, la Représentation Permanente de la France à Rome veille à promouvoir une bonne intégration des problématiques de genre au sein des politiques et des programmes des trois agences des Nations unies basées à Rome. La Représentation permanente porte un plaidoyer continu pour que l’égalité entre les femmes et les hommes soit intégrée de manière transversale à l’ensemble des actions des organisations des Nations unies basées à Rome.

La mission française participe également aux réunions et activités du réseau des Représentations permanentes sur la problématique hommes-femmes (Network for Women’s Empowerment and Gender Equality’ ou Gender Network) né en 2008 sous l’impulsion de femmes représentantes permanentes et qui se réunit occasionnellement pour évoquer les actions entreprises par les institutions des Nations unies basées à Rome sur la parité et l’égalité femmes-hommes.

La France a coprésidé en juin 2021 le Forum Génération Égalité rassemblement mondial pour l’égalité entre les femmes et les hommes, organisé par ONU Femmes en partenariat avec la société civile. Il a constitué un moment essentiel pour réaffirmer l’engagement de la communauté internationale à promouvoir les droits des filles et des femmes et construire des sociétés plus égalitaires.

Dernière modification : 10/09/2021

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